Des dégâts de grande ampleur dans le grand quart Nord-Est de la France
Au 31 octobre 2019, les volumes de bois d’épicéas attaqués par les scolytes entre 2018 et 2019 étaient estimés à plus de 2,2 millions de m3 dans le Grand Est et plus de 1,2 millions de m3 en Bourgogne Franche-Comté1.
Cette « estimation basse », puisqu’elle ne concerne que les bois ayant été commercialisés, met en évidence l’ampleur des attaques de scolytes et la forte progression des dégâts constatés entre 2018 et 2019 (+ 152 %).
Le lancement d’un dispositif d’aide par l’Etat
Pour faciliter la mobilisation et la commercialisation des bois touchés, un dispositif d’aide est mis en place.
Il vise à inciter les acteurs des filières d’utilisation des bois d’œuvre, d’industrie et énergie à consommer en priorité les bois scolytés, dans le but de les extraire rapidement des forêts touchées.
Un décret et un arrêté publiés au journal officiel le 2 décembre 2019 en précisent les conditions :
- Cette aide est destinée aux propriétaires privés et aux collectivités qui possèdent des forêts situées dans les régions Grand-Est et Bourgogne-Franche-Comté, ainsi que dans les départements de l’Aine de Savoie et de Haute-Savoie.
- L’aide varie de 5 à 20 €/m3, en fonction de la distance séparant le lieu de récolte du bois et son lieu de transformation.
- Un volume minimum de 600 m3 est nécessaire pour déposer un dossier de demande d’aide.
Celui-ci peut être déposé par un bénéficiaire seul ou par une structure de regroupement, tel qu’un organisme de gestion en commun (OGEC), une organisation de producteurs (OP), un Expert forestier, l’ONF, une association syndicale, … - Les dossiers de demande d’aide pourront être déposés jusqu’au 23 novembre 2020 auprès de la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF) du lieu de récolte.
Les formulaires de demande et les conditions d’éligibilité sont précisées dans l’Instruction technique.
Quel impact pour la filière bois en Normandie ?
Si les forêts normandes sont pour le moment peu touchées par ce phénomène, une vigilance particulière est requise.
Par ailleurs, la mise sur le marché d’un volume important d’épicéas en 2020 et la mise en œuvre de l’aide de l’Etat favorisant leur transformation dans des entreprises situées à grande distance pourraient avoir en Normandie une répercussion sur les prix de vente de résineux blancs, dont les cours ont déjà fortement baissé en 2019 à l’échelle nationale2.
1 sources : FIBOIS Grand Est et FIBOIS Franche-Comté
2 sources : ONF
Témoignage de Monsieur Bruno ARNOULD
Propriétaire d’une forêt à Saint-Gatien des Bois dans le Calvados.
« Nous avons été amenés à exploiter 24 hectares d’épicéas communs atteints par le scolyte. Les différentes tempêtes ayant touché notre propriété ainsi que la succession de période hivernales douces et de période estivales extrêmement chaudes ont probablement favorisé le développement du typographe, qui s’est largement répandu sur la propriété en 2018.
Les bois scolytés ont été évacués par mesure préventive au printemps 2019, mais cela n’a pas suffit à stopper sa progression. Aujourd’hui, nous avons décidé de maintenir sur pied 12 hectares d’épicéas a priori non atteints par le scolyte. Toutefois, je crains que celui-ci ne redémarre au printemps et qu’il nous soit nécessaire d’exploiter ces peuplements à l’automne 2020.
Face à l’urgence de sortir les bois solytés, dont la qualité est rapidement impactée, nous avons été contraints d’exploiter la parcelle cet automne par conditions très humides. Les ouvriers chargés de l’exploitation ont fait un travail exemplaire pour minimiser l’impact sur les sols. Mais n’ont pu empêcher de gros dégâts par endroits. Ces derniers constituent un impact supplémentaire sur la remise en production de la forêt.
Même si l’on est préparé à l’exploitation d’une forêt productive, c’est une période difficile à vivre personnellement, et je ne suis pas le seul dans ce cas. Le cap est difficile à franchir. »