Le bois et les journées du patrimoine

Pour les journées européennes du Patrimoine, Fibois Normandie a proposé au grand public de participer à 2 visites, l’une à Rouen, l’autre à Port-en-Bessin. 2 visites, 2 ambiances !

Revenons sur ce patrimoine en bois !

Charpentiers du grand large : visite du chantier de restauration de la barque les Deux-Amis

Prendre la mer en caressant le bastingage en bois poli par le temps et par les éléments d’un vieux grément vous fait rêver ? Le chantier naval Bernard, à Port-en-Bessin a ouvert ses portes à Fibois Normandie lors des Journées du patrimoine 2025 pour une visite du chantier de restauration du cordier Les Deux-Amis, bateau de 1949 qui a rangé ses filets depuis quelques années.

1949 : les Deux Amis prend la mer pour la première fois, au large de Cherbourg. Pendant 73 ans, sa coque en orme de 15 mètres de long affronte la mer et les embruns, prouvant la durabilité et la résistance du bois. En 1993, le cordier est classé Monument historique. En 2022, après toutes ces années, ayant bien servi, le bateau rentre au chantier naval pour une grande restauration : la partie arrière et la voûte, d’abord, puis la partie avant, l’étrave, les espars, les aménagements, etc.

L’association les Deux-Amis prend en main le projet. Son but est avant tout de sauvegarder la barque, patrimoine important pour l’histoire maritime de la région. Pour cela, le bateau doit être reconstitué. L’association en profite pour modéliser complètement la coque grâce au procédé numérique de photogrammétrie. Cela permet à la fois de conserver des plans précis, mais aussi de corriger des déformations dues au temps, et de découper des gabarits grâce à une imprimante numérique pour faciliter le travail des charpentiers.

En effet, plusieurs charpentiers et menuisiers sont à l’œuvre sur le chantier. Quoi de plus logique pour une construction en bois ? De jeunes charpentiers de marine sont donc engagés pour ce projet de restauration, appuyés par des charpentiers expérimentés. Le bois local est privilégié, pour maintenir la tradition. La coque est ainsi en chêne, le pont sera en résineux, et les aménagements sont encore en réflexion. Dessiné, taillé, courbé : le chêne encore vert se plie au travail précis des artisans. Chaque pièce est unique, comme la fierté de voir se reconstituer, jour après jour, ce grand squelette de bois.

Amoureux du bois ou de la mer, il est possible d’accompagner ce projet normand en soutenant l’association les Deux-Amis. 120 000 € doivent encore être trouvés pour aller au bout de la restauration et remettre le bateau à flot !

www.deux-amis.fr

Découvrez la formation  : Charpentier de marine

la Normandie accueille l’un des trois seuls CAP Charpentier de marine, et BP Charpentier de marine au lycée Doucet, à Cherbourg.

Rue Beauvoisine : quand les pans de bois racontent Rouen

A l’occasion des journées du patrimoine, treize visiteurs ont parcouru la rue Beauvoisine à Rouen, accompagnés par Michel Joly, président de la Société des Amis des Sciences Naturelles et du Muséum de Rouen, qui leur a commenté la structure et l’histoire des maisons à pans de bois de la ville.

La rue Beauvoisine n’est pas aujourd’hui la rue la plus touristique de Rouen ; pourtant, historiquement, elle fut l’une des principales voies de circulation de la ville, reliant le nord et le sud. Son intérêt réside dans la richesse de son architecture, qui témoigne de plusieurs siècles d’évolution : on y trouve des maisons à colombages datant du XVe, XVIe, XVIIe et XVIIIe siècle. Peu de rues rouennaises offrent une telle diversité « séculaire ».

Michel Joly a détaillé la structure traditionnelle de ces maisons. Leur base est constituée d’un sous-bassement en pierre, destiné à éviter les remontées d’humidité. Viennent ensuite les sablières basses, pièces de bois horizontales, qui accueillent les poteaux et les colombes verticales. L’espace entre les bois, appelé « hourdage », était autrefois rempli de torchis.

La promenade dans la rue révèle aussi les contrastes sociaux de l’époque : la partie haute de la rue reflète un habitat plus modeste, tandis que la partie basse abrite de nombreux hôtels particuliers, témoignant d’une population plus aisée.

Un détail souvent méconnu attire l’attention : toutes les maisons à pans de bois ne se présentent pas avec des colombages apparents. Beaucoup ont été recouvertes de plâtre parfois sculpté pour imiter la pierre, pratique datant du milieu du XVIIIe siècle. Ce choix n’avait rien d’anecdotique : il permettait aux habitants d’afficher un statut social supérieur et de donner à leur demeure une apparence plus prestigieuse.